La Loi canadienne sur la responsabilité en matière de carboneutralité (LCRMC) enchâsse dans la loi l’engagement du gouvernement du Canada à atteindre la carboneutralité d’ici 2050. La Loi fixe l’objectif pour 2030 en matière d’émissions de gaz à effet de serre, qui est la contribution déterminée au niveau national (CDN) du Canada en vertu de l’Accord de Paris, soit des réductions d’émissions de l’ordre de 40 à 45 % par rapport aux niveaux de 2005 d’ici 2030, passant de 739 millions de tonnes (Mt) en 2005 à une fourchette de 406 à 443 Mt d’ici 2030. La Loi prévoit également l’obligation d’établir des objectifs nationaux de réduction des émissions par intervalles de cinq ans, dix ans à l’avance. Chaque objectif devra être assorti de plans de réduction des émissions crédibles et fondés sur des données scientifiques pour y parvenir.
La position de l’Académie canadienne du génie (ACG) est qu’elle partage l’urgence, telle qu’énoncée par le gouvernement du Canada et par la population canadienne en général, concernant la nécessité de réduire les émissions de GES de façon considérable. L’ACG reconnaît en outre que l’ampleur et la complexité générales du programme de développement des infrastructures requis ainsi que les exigences de financement connexes sont sans précédent au pays. Cela comprend la commercialisation de plusieurs technologies essentielles qui n’ont pas été entièrement éprouvées. Pour relever ce défi de taille, il est nécessaire d’assurer rapidement l’harmonisation des voies et des stratégies de transformation « optimales » pour atteindre à la fois les objectifs économiques et ceux liés à la réduction des GES, de conclure des ententes entre les gouvernements, l’industrie, les Premières Nations et d’autres intervenants principaux en vue de leur mise en œuvre dans un délai très serré (maintenant, dans moins de trente ans), et de faire progresser la capacité institutionnelle en matière de planification générale, d’élaboration de politiques et de réglementation à l’appui.
Il est donc nécessaire, également, de respecter le fait qu’il existe des risques réels que les objectifs très ambitieux fixés pour 2030 et 2050 puissent ne pas être atteints dans les délais prévus. Il faut aussi être réaliste quant à ce que l’on peut accomplir d’ici le milieu du siècle. Il s’ensuit donc que le programme général d’activités au cours des trois prochaines décennies devrait reposer sur la réalisation du plus grand nombre possible de progrès en matière de réduction des émissions de GES, sur la mise en œuvre rapide et rentable de ces mesures de réduction et sur le soutien essentiel des Canadiennes et des Canadiens qui seront tous touchés par l’augmentation des coûts, en particulier pour les services liés à l’énergie. Tout au long de ce processus, il est nécessaire d’assurer une croissance économique constante tout en faisant la transition vers un avenir de carboneutralité.
Les principaux objectifs du présent document sont les suivants :
Ce document se penche sur le défi de réduction des émissions de GES du Canada. Il existe également des considérations parallèles pour relever les défis très importants que pose l’adaptation, d’autant plus que les effets du changement climatique au Canada sont déjà évidents avec l’augmentation des événements météorologiques extrêmes. Un document parallèle de l’ACG porte précisément sur l’adaptation.
Premières priorités en matière de réduction des GES
À l’heure actuelle, les options pour éliminer directement le CO2 dans l’atmosphère (puits de GES) sont limitées. Elles manquent d’envergure et coûtent cher. Les principales options comprennent la séquestration accélérée du CO2 dans le secteur des « terres » (dont la foresterie et l’agriculture), la production de bioénergie associée au captage et stockage du carbone (BECCS), l’extraction directe dans l’air et la minéralisation du carbone. Il faudra des décennies pour atteindre une absorption importante de CO2 dans l’atmosphère, et il est peu probable que cela contribue de façon importante à l’engagement de carboneutralité du Canada d’ici 2050. Il en résulte que la réduction des émissions de GES sera la stratégie dominante vers la carboneutralité d’ici le milieu du siècle.
Pour réduire rapidement les émissions de GES de façon considérable, la priorité nationale immédiate devrait être de définir des voies, des stratégies et des mesures connexes pour pratiquement éliminer les deux sources dominantes d’émissions de GES, qui représentent collectivement 87 % des émissions totales[1]. Il s’agit notamment de remplacer la combustion directe des hydrocarbures (74 % des émissions totales) par des options d’approvisionnement sans émissions de GES, et d’éliminer, dans la mesure du possible, la libération directe de méthane (13 % des émissions totales) dans l’atmosphère[2].
1 – Éliminer les émissions dues à la combustion provenant des hydrocarbures
Pour remplacer la combustion des hydrocarbures par des options sans émission de GES, il faut se pencher sur ses deux utilisations finales, soit l’énergie motrice et l’énergie thermique. L’énergie motrice provient de la combustion de combustibles fossiles et de l’utilisation de cette énergie pour les moteurs qui, en retour, servent à différentes fins : véhicules de transport, turbines, compresseurs, pompes, perceuses, entraînements industriels, etc. Il est important de comprendre que lors de la combustion de combustibles fossiles pour générer une énergie motrice, seulement 20 à 40 % de l’énergie primaire est fournie par les moteurs en raison des limites thermodynamiques. Les 60 à 80 % restants sont convertis en chaleur qui, dans la plupart des cas, est simplement rejetée dans l’atmosphère. Il est toutefois possible de récupérer une partie de cette chaleur et de l’utiliser de manière avantageuse, comme pour l’ajout de turbines à vapeur aux compresseurs en vue de la production d’électricité à cycle combiné ou pour diverses applications de production combinée.
L’énergie thermique est basée sur l’utilisation de l’énergie, directement à partir de la combustion, pour diverses applications. Pour les bâtiments, cela comprend le chauffage local, l’eau chaude, la production de vapeur et la cuisson. Pour l’industrie, l’énergie thermique est aussi utilisée pour diverses applications à haute température. L’aspect distinctif de l’énergie thermique par rapport à l’énergie motrice est qu’il n’y a aucune perte thermodynamique dans le processus de conversion de l’énergie.
Les principales options d’approvisionnement sans émissions pour l’énergie motrice et l’énergie thermique comprennent l’approvisionnement en électricité et en hydrogène sans émissions de GES.
Pour la plupart des utilisations de l’énergie motrice, l’option la plus prometteuse repose sur la conversion en électricité. Cependant, l’option la plus prometteuse pour le transport de marchandises lourdes et de marchandises ferroviaires est, pour le moment, la conversion en piles à hydrogène.
Les options les plus prometteuses pour fournir de l’énergie thermique, comme mentionné, comprennent l’électricité et l’hydrogène. Pour les bâtiments existants qui ont recours à la combustion d’hydrocarbures (principalement, le gaz naturel) pour l’énergie thermique, l’option qui suscite actuellement le plus d’attention est le remplacement des chaudières au gaz naturel, des fours et des cuisinières par d’autres solutions électriques, dont les plinthes chauffantes et les thermopompes. Il s’agit toutefois d’une transition coûteuse, car l’équipement actuel devra être remplacé, avec les coûts connexes, tant pour le retrait que pour le remplacement de l’équipement, les coûts de remise en état du bâtiment, les coûts généralement plus élevés de l’électricité par rapport au gaz naturel par unité thermique, et le remboursement possible des systèmes de distribution du gaz naturel actuels qui peuvent devenir des « investissements délaissés » s’ils sont mis hors service avant la fin de leur durée utile.
L’utilisation d’hydrogène à 100 % dans les infrastructures actuelles de distribution du gaz naturel en tant qu’option potentiellement moins coûteuse suscite une attention croissante dans plusieurs pays. Cette option nécessite toutefois une évaluation scientifique et technique détaillée pour confirmer sa viabilité sur les plans technique et économique. Les décisions stratégiques pourront ensuite être fondées sur l’option de transformation la plus favorable pour l’approvisionnement en énergie thermique des bâtiments existants.
Pour les nouveaux bâtiments, il faut faire un choix entre l’utilisation de l’électricité et de l’hydrogène en fonction du coût et de l’acceptabilité sociale. Dans l’intervalle, cependant, l’expansion de l’infrastructure de distribution du gaz naturel devrait, en général, être limitée jusqu’à ce qu’il soit démontré que l’utilisation potentielle de l’hydrogène à 100 % constitue une option concurrentielle, sécuritaire et fiable pour l’approvisionnement en énergie thermique des nouveaux bâtiments.
Pour les applications industrielles à haute température, les options les plus prometteuses sont, encore une fois, fondées sur le coût relatif entre l’électricité, dont les fours électriques à arc, et l’hydrogène.
En ce qui concerne la production d’électricité sans émission de GES, les options comprennent l’hydroélectricité, l’énergie nucléaire, l’énergie éolienne, l’énergie solaire, l’énergie thermique (principalement, le gaz naturel) avec CSC, l’énergie géothermique et le stockage (accumulation par pompage et batteries) pour l’approvisionnement des réseaux à grande échelle, et l’énergie solaire sur les toits et les systèmes énergétiques collectifs pour l’approvisionnement des micros-réseaux. En ce qui concerne la production d’hydrogène sans émission de GES, les options sont le reformage des hydrocarbures avec CSC et l’électrolyse. Plus de 90 % de la production d’hydrogène à l’échelle mondiale et au Canada repose sur le reformage des hydrocarbures. Même en tenant compte des coûts supplémentaires de CSC, les coûts actuels de la production d’hydrogène par le reformage des hydrocarbures sont, généralement, bien en deçà de ceux pour l’électrolyse[3].
2 – Prévenir et éliminer les rejets de méthane dans l’atmosphère
Cet aspect comprend la prévention et le contrôle accrus des fuites de méthane dans les infrastructures d’approvisionnement et de livraison du gaz naturel (pipelines et lignes de distribution), les usines de traitement, les raffineries, les têtes de puits et les puits abandonnés. Il comprend également la réduction des rejets de méthane provenant des sites de décharge (en particulier, les sites municipaux) et du secteur agricole, au moyen de la prévention et du captage. La stratégie principale consiste à capter et à recueillir le méthane lorsque possible, et à l’utiliser à des fins avantageuses (chauffage, production d’électricité, etc.) ou le séquestrer. En dernier recours, il faut le brûler, car l’incidence sur le réchauffement climatique des émissions de CO2 qui en découlent est beaucoup moins importante que celle du méthane.
Évolution du secteur canadien des hydrocarbures
Avec les changements susmentionnés, et sous réserve d’une viabilité éprouvée sur le plan technique et sur le plan de la compétitivité des coûts de l’hydrogène en guise de source d’approvisionnement énergétique sans émission de GES, les prévisions de la transformation du secteur canadien des hydrocarbures vont comme suit :
Changements fondamentaux pour atteindre les objectifs de réduction des GES déclarés au Canada
Pour réaliser des transformations majeures dans le système énergétique du Canada et ainsi atteindre les objectifs en matière de développement économique et de réduction des GES, les trois ensembles d’activités suivants doivent avoir lieu.
1 – Mise en œuvre du plus important programme d’infrastructure de l’histoire du Canada
Le premier ensemble d’activités comprend l’élaboration et le financement d’un programme de grandes infrastructures ainsi que le soutien et la commercialisation de plusieurs technologies de transformation essentielles.
Dans une étude mondiale récente menée par le McKinsey Global Institute[4], il a été déclaré que « les dépenses en capital sur les actifs physiques pour les systèmes énergétiques et d’utilisation du territoire, dans le cadre de la transition vers la carboneutralité entre 2021 et 2050, totaliseraient en moyenne 275 billions de dollars US ou 9,2 billions de dollars par année, soit une augmentation annuelle pouvant atteindre 3,5 billions de dollars par rapport à aujourd’hui. » [traduction] Le Canada produisant 1,8 % du PIB mondial, une estimation très approximative des dépenses en capital annuelles correspondantes serait de 207 milliards de dollars canadiens. Il est probable que le besoin de dépenses en capital du Canada soit plus élevé que la moyenne mondiale, car le pays se situe loin derrière les économies les plus développées en matière de réduction des GES. Il affiche toujours les émissions par habitant les plus élevées du G7 et est le seul pays de ce groupe à afficher des émissions plus élevées qu’en 1990 (année de référence du GIEC).
Le budget de 2022 du Canada tient compte de la nécessité d’une augmentation importante des dépenses en capital pour atteindre la carboneutralité. L’investissement annuel requis a connu une hausse, passant de la fourchette actuelle de 15 à 25 milliards de dollars à une fourchette de 125 à 140 milliards de dollars, soit une multiplication par six environ. Cependant, comme il a été mentionné précédemment, le besoin de dépenses en capital pour atteindre la carboneutralité au Canada sera probablement plus élevé.
À titre d’exemple des dépenses en capital très élevées nécessaires pour atteindre la carboneutralité, le Canada doit faire passer son approvisionnement en électricité de 150 GW à plus de 400 GW[5] d’ici le milieu du siècle, tout en assurant la transition du système actuel vers une production à faibles émissions. Il est en outre nécessaire de procéder à la réhabilitation majeure de l’infrastructure d’approvisionnement actuelle, dont une grande partie est désuète et doit être mise à niveau ou remplacée. Pour le secteur des hydrocarbures, d’importants investissements sont prévus dans le reformage des hydrocarbures, sous réserve d’une évolution majeure vers l’utilisation de l’hydrogène, et dans la mise au point de systèmes de captage, de collecte, de transport et de séquestration du carbone à l’échelle du système. Le programme d’infrastructure comprend également des investissements dans les transformations de l’utilisation finale, comme les postes de recharge pour l’approvisionnement en électricité et en hydrogène, et pour la conversion des systèmes d’approvisionnement en énergie thermique dans les bâtiments et l’industrie à l’utilisation de l’électricité ou de l’hydrogène.
Il convient de noter que la voie vers la carboneutralité nécessitera également des investissements dans plusieurs technologies qui sont généralement connues, mais qui n’ont pas encore été totalement éprouvées. Il faut accélérer la recherche scientifique, le développement et la commercialisation pour faire avancer les technologies susceptibles de devenir des options de transformation importantes vers l’atteinte de la carboneutralité, et pour faire progresser les diverses étapes, du développement à la commercialisation complète. Voici quelques exemples :
L’une des difficultés particulières est de tenir compte des risques associés à la progression de ces technologies de transformation vers leur commercialisation et leur adoption à grande échelle. Les programmes de grandes infrastructures antérieurs au Canada étaient généralement fondés sur la mise en œuvre de projets à l’aide de technologies éprouvées. Pour le défi de carboneutralité, le programme de développement des infrastructures comprendra également plusieurs technologies qui ne sont pas encore éprouvées, avec des risques techniques, financiers et de planification importants. Les nouvelles technologies nécessitent généralement de dix à vingt ans pour qu’un concept soit commercialisé, et une période plus longue pour leur adoption à grande échelle. À l’heure actuelle, bon nombre des options de technologies prometteuses n’ont pas encore évolué au-delà de la phase du concept, avec des risques et des incertitudes évidentes concernant la voie optimale vers la carboneutralité. Il devrait également être évident que la contribution potentielle de ces technologies à l’objectif de réduction des GES d’ici 2030 (seulement huit ans) est, au mieux, très limitée.
En conséquence directe des réductions importantes dans le développement de l’infrastructure au Canada, surtout au cours des trois dernières décennies, une grande partie de l’expertise et de la capacité du Canada à gérer la mise en œuvre de programmes de grandes infrastructures, qui existaient entre 1950 et 1990, a été perdue. Il faut rétablir cette capacité pour s’assurer que le programme d’infrastructures massives pour atteindre la carboneutralité peut de nouveau être mis sur pied avec succès, dans le respect des exigences relatives au budget, aux délais, à la sécurité et à la durabilité.
2 – Établissement des processus et des structures de planification, de politique et de réglementation
Le deuxième ensemble d’activités inclut l’établissement du cadre qui appuie les processus de prises de décisions et les structures nécessaires pour concevoir un programme rentable et acceptable sur le plan social, menant à la carboneutralité. Cela comprend la planification entièrement intégrée et un cadre de politique complet avec des règlements et des incitatifs à l’appui.
Une planification factuelle et exhaustive est nécessaire pour définir les voies et les stratégies rentables permettant de réduire considérablement les émissions de GES, tout en contribuant à la croissance économique, et ainsi d’assurer une transition rentable et ordonnée vers la carboneutralité pour le Canada. Les démarches, processus et méthodes de planification doivent être conformes à l’expertise et aux pratiques exemplaires mondiales.
En ce qui a trait à l’élaboration et à l’application d’un cadre stratégique complet pour la réduction des GES, des travaux préparatoires sont toujours nécessaires. Même si la tarification du carbone s’avère une option utile dans la « boîte à outils » stratégique, elle doit être complétée par d’autres options stratégiques, dont des investissements ciblés du secteur public, des partenariats entre les secteurs public et privé, un soutien financier pour les technologies nouvelles et émergentes, l’utilisation ciblée de subventions, d’incitatifs et de réglementations, ainsi que des mesures de contrôle du prix du carbone aux frontières internationales. Le cadre stratégique doit être souple pour s’assurer qu’il est utilisé de la manière la plus efficace possible, y compris concernant la répartition et l’utilisation optimales des taxes sur le carbone. Il est essentiel d’harmoniser les politiques réglementaires et la réglementation avec celles d’autres pays importants pour le Canada, surtout les États-Unis et le Mexique, pour assurer le soutien de l’économie canadienne axée sur les ressources et l’exportation.
3 – Démarches pour des processus de décision et d’exécution efficaces
Le troisième ensemble d’activités repose sur l’efficacité des processus de prises de décisions qui facilitent la coordination et la prise d’engagements conjoints entre les dirigeants politiques et des gouvernements fédéral, provincial et territorial, ainsi qu’avec l’industrie, les entreprises, les Premières Nations et d’autres intervenants principaux. Il est nécessaire de résoudre rapidement les principaux obstacles réglementaires comme les revendications territoriales des Premières Nations. Il est en outre nécessaire de créer un environnement de réglementation favorable et coopératif qui appuie le programme de développement des infrastructures le plus important et le plus complexe de l’histoire du Canada. Cette transformation essentielle est particulièrement difficile dans le contexte actuel, où les approbations très longues, les exigences de projet onéreuses et la diminution de l’appui du public pour les développements de grandes infrastructures ont fortement dissuadé ces développements. Si l’on veut atteindre l’objectif de carboneutralité, il y a cependant un besoin réel de changement fondamental dans les structures et processus réglementaires, et pour assurer un fort leadership coordonné qui garantit la prestation efficace d’un programme de transformation massif et très complexe.
L’appui du public pendant la transition vers la carboneutralité est particulièrement important. Le public continuera de demander des services énergétiques fiables, sécuritaires et abordables. Toutefois, la voie vers la carboneutralité entraînera des coûts que le public devra assumer, notamment l’augmentation des taxes et (ou) des coûts pour les services énergétiques et les produits à forte intensité d’énergie. Comme l’indique le rapport de McKinsey cité précédemment, le coût de l’électricité, en particulier, devrait augmenter de façon très importante, car la plus grande partie du programme de dépenses en capital sera consacrée à l’infrastructure électrique. À l’heure actuelle, le public canadien est mal renseigné sur les voies et les plans de carboneutralité ainsi que sur les répercussions financières pour chaque ménage. Il est évident qu’un dialogue honnête sur les coûts et les répercussions auprès du public votant doit être engagé, ce qui risque d’être très difficile. Cela dit, si l’on veut atteindre l’objectif de carboneutralité, les citoyens canadiens doivent comprendre, accepter et soutenir les coûts et les répercussions de la transition vers la carboneutralité.
Rôle important des ingénieurs
Comme il a été mentionné ci-dessus, le rôle des ingénieurs canadiens gagnera en importance à mesure que le Canada s’efforce d’atteindre la carboneutralité. Traditionnellement, les ingénieurs ont été à l’avant-garde de l’ingénierie et de la mise en œuvre de programmes de grandes infrastructures. Aujourd’hui, leur rôle est encore plus important pour ce qui est d’exécuter le programme d’infrastructure le plus important et le plus complexe de l’histoire du Canada. Ils ont également été à l’avant-plan de la mise au point et de la commercialisation de technologies nouvelles et émergentes qui sont maintenant reconnues comme étant absolument essentielles pour aider le Canada à atteindre la carboneutralité. Cela comprend le développement de ces technologies au cours des différentes phases que sont la recherche scientifique, les essais, la mise au point, la démonstration et la commercialisation. Des intrants techniques seront également nécessaires pour préparer des plans factuels complets et intégrés afin d’assurer la transition vers la carboneutralité d’une manière rentable, opportune, acceptable sur le plan social et financièrement responsable.
Préparé par :
Oskar T. Sigvaldason, Ph. D., ing., FCAE
Comité de l’avenir de l’ingénierie
Académie canadienne du génie
Avril 2022
[1] Rapport d’inventaire national 1990-2019 : sources et puits de gaz à effet de serre au Canada; La déclaration du Canada à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, 2021.
[2] Le pourcentage de 13 % est basé sur le potentiel de réchauffement de la planète équivalent en CO2 en 100 ans. Cependant, le potentiel de réchauffement de la planète pour le méthane en 20 ans est plus de 3 fois plus élevé. C’est l’une des principales raisons pour lesquelles la réduction du méthane mérite également d’être considérée comme une priorité pour ce qui est de réduire les émissions de GES au cours des trois prochaines décennies.
[3] Consulter la page 15 sur les coûts de production d’hydrogène; B.C. Hydrogen Strategy; A Sustainable Pathway for B.C.’s Energy Transition; 2021.
[4] McKinsey & Company; McKinsey Global Institute; The Net Zero Transition; janvier 2022.
[5] Cela s’appuie sur les résultats d’études nationales antérieures prévoyant un approvisionnement en électricité de 2,5 à plus de 3 fois supérieur d’ici 2050. Voir le projet Trottier Energy Futures Project (2016) et le projet United Nations Decarbonization Project (2014).